La Passion du Christ a été un thème récurrent du répertoire de la peinture classique et l’épisode de la Crucifixion, qui en est son paroxysme tragique, est devenue l’image emblématique la pluspuissante et la plus douloureuse du sacrifice humain. Déni de culture, plutôt qu’à l’époque réelle du Christ, les représentations qu’ont en faites les grands peintres ont été longtemps installées dans leur propre contemporanéité : personnages, habits, architectures et décors. En l’aménageant au regard des connaissances, des sensibilités et du contexte actuels, Crucify Now! transpose la scène du crucifiement de Jésus de Nazareth à nos jours. Cette re-visitation de la mort de Jésus sur la croix se fonde, tant sur les Évangiles Synoptiques et l’Évangile selon Jean, que sur la recherche du Jésus de l’Histoire, nourrie des données des textes apocryphes ainsi que des travaux exégétiques les plus récents qui tendent à réinsérer cette figure sacrée dans sa judéité. Sous réserve des aménagements jugés nécessaires et des messages intimes distillés au gré des compositions, l’iconographie de la dramaturgie de la Crucifixion, telle qu’elle obéit à un canon relativement strict, a été respectée. Le présent travail, tout en se référant au répertoire de la peinture classique dont il est largement inspiré, a été élaboré à partir d’images existantes de notre temps, dont certaines sont devenues parties intégrantes de la mémoire collective. Piochées pour la plupart dans les médias, notamment sur Internet, elles ont été scannées, imprimées et réinterprétées «à la main» par l’artiste, avant d’être retouchées, remixées puis finalisées par utilisation des outils numériques. Les éléments constitutifs de l’oeuvre ont été ainsi fabriqués séparément avant d’être combinés et assemblés au terme d’un tripotage qui a conduit, étape après étape, à l’agencement définitif de chacun des «tableaux» réalisés. La place occupée dans les compositions par certains détails - au sens où l’entendait Daniel Arasse - comme autant de surprises picturales, avec parfois de spectaculaires changements d’échelle, contribue à opposer le monde de la représentation sacrée et celui du spectateur. Afin de souligner à la fois la valeur cérémonielle et mystique de la scène et le pathétique du moment représentés, une volonté de grande simplicité a été conjuguée avec une exigence de rigueur, dans des compositions très formelles, caractérisées par un système de mise en page et un respect de la symétrie. L’oeuvre s’inscrit dans la mouvance du grand retour au religieux et souhaite renouer, tout en utilisant les moyens plastiques actuels, avec la tradition picturale européenne de la bella maniera, dans la continuité du grand art occidental, en hommage aux grands peintres classiques.